L’autobiographie restaurative – Etape 4 : Restaurer

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Pour survivre au traumatisme, il faut pouvoir le raconter sous forme d’histoire.

Natasha TRETHEWEY – Memorial Drive

Survivre à son histoire, la mettre à une juste distance de soi pour ne plus se sentir submerger, pouvoir continuer à vivre avec et non malgré… Les indicateurs d’une restauration peuvent être nombreux et protéiformes. Dans le cas d’une autobiographie restaurative, tous sont liés à la réconciliation.

Assumer son histoire

Se réconcilier avec son histoire, l’assumer, c’est être capable d’en parler, de la façon dont on souhaite en parler : en ne faisant que l’évoquer, en donnant des détails, en présentant les faits ou en se concentrant sur notre ressenti, en décrivant les conséquences ou en affichant les leçons tirées, ou même, et les bienfaits seront tout aussi importants, en ne racontant que l’après, le maintenant, la nouvelle vie que l’on s’apprête à vivre, maintenant que tout ça est digéré.

D’après Boris CYRULNIK, deux dangers menacent la mémoire : ne pas en parler ou trop en parler.

À l’issue d’une démarche d’autobiographie restaurative, le narrateur est en mesure de placer le curseur de sa narration là où il le souhaite, de façon consciente et confiante. D’ailleurs, lorsqu’à la fin de mes accompagnements, j’invite les narrateurs à se positionner sur une échelle d’acceptation de leur histoire, tous confirment qu’ils ont gagné en assurance et qu’ils se sentent plus alignés avec leur vécu et plus apaisés. L’effet restauratif opère, sur leur histoire et sur leur estime d’eux-mêmes.

La double écoute restaurative

Au démarrage, il n’est pas rare qu’une demande de démarche d’autobiographie restaurative s’accompagne d’une volonté de publication. En effet, à ce stade, les narrateurs motivés par un besoin de se faire entendre et de faire valoir leur parole sont nombreux. « Je suis prêt à raconter et je veux que tout le monde sache ». Pour la plupart, être entendu induit un maximum de lecteurs. Ils n’imaginent pas encore que le processus de restauration passe avant tout par eux, et par le biographe.

D’abord parce que le principe de re socialisation est inhérent à la relation entre ces deux acteurs.  À travers sa posture décentrée, le biographe est entièrement dédié à l’écoute. Face à lui, aucun risque de jugement ou de remise en question : il n’est que récepteur. Après de longues années de silence, cette écoute neutre et inconditionnelle restaure le lien à l’autre dans un cadre intimiste et sécurisant.

Ensuite, parce que le narrateur est son premier lecteur. Et que se lire, c’est s’écouter. À chaque proposition d’écriture, il peut réajuster ce qu’il a oublié de dire, ce qu’il veut re préciser, ce sur quoi il veut insister. Il peut même rayer ce qui avait simplement besoin d’être exprimé sans être gardé. Au-delà de s’exprimer, il s’écoute. Il s’offre le temps qu’il n’a peut-être encore jamais accordé lui-même à sa propre parole. Se faisant, il restaure sa propre vision de son vécu, et s’autoréconcilie avec indulgence.

À l’issue de la démarche, bien souvent, la révélation n’a plus besoin d’être portée aux yeux du monde puisqu’elle s’est déjà opérée, implicitement. Pour certains, le manuscrit ne sera peut-être même pas partagé. Pour autant, la révélation est bel et bien là, pour soi, en soi.

Paroles de restaurations

« Plus je relis mon histoire, plus je l’assume, et plus j’ai envie de la faire lire afin qu’elle soit connue ».

« Ce que j’ai vécu m’a permis de devenir la personne que je suis. Aujourd’hui, j’en prends enfin conscience et je n’ai aucun regret ».

« Je me sens libéré d’avoir pu déposer mon histoire, de ne plus être obligé de me la raconter sans cesse pour ne pas l’oublier. Et j’ai pardonné ». 

« J’entends tellement d’histoires que j’avais oublié quelle était la mienne. Maintenant que je m’en sens imprégnée, j’apprends à l’apprivoiser ».

« En écrivant mon histoire, je me la suis appropriée. J’ai choisi les mots, l’ordre des choses, l’angle sous lequel j’avais envie de la raconter. Désormais, elle ressemble à ce que je veux ».

Paroles de narrateurs ayant entrepris une démarche d’autobiographie restaurative

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