
Comment faire de notre passé une force d’avenir ?
Dans son livre » Vivre avec son passé, une philosophie pour aller de l’avant « , Charles Pépin s’intéresse à et interroge notre passé. Selon
Article
Si vous continuez de vous montrer curieux envers mes premières années, je commencerai peut-être à vous dévoiler les premières fissures. Je vous parlerai peut-êetre alors de mon frère, avec qui, sous couvert de jeu, un contrat de servitude s’était scellé entre nous. J’étais l’esclave du petit roi. Si je répondais à ses demandes, il acceptait de me considérer. Combien de fois ai-je dû l’habiller parce que lui-même avait la flemme de le faire ?
J’avais juste besoin d’une main tendue, d’une oreille attentive, d’être écoutée. J’ai toujours été entourée, tout en étant très seule. Je suis le cinquième enfant d’une fratrie de 10. Je devais me faire entendre. Il fallait constamment que je prouve ma légitimité, pour faire valoir mon existence. « HéHo ! Je suis un être humain, j’ai des ressentis ! ».
Nous nous sommes rencontrés adolescents, et nous sommes quittés vieux. Nos vies se sont construites de façon conjointe, parfois à des rythmes différents, mais toujours en parallèle. Elle m’a transformé. Je n’aurais jamais vécu cette vie, si, ce soir-là, elle n’avait pas glissé sa main dans la mienne à la sortie du bal.
Mon père m’a toujours dit « Nous sommes un peuple nomade. Nous n’avons fait que nous déplacer au gré des batailles. Tu as eu beaucoup de chance jusqu’à maintenant, mais la situation politique est en train de changer. Tu devrais partir. » Alors je l’ai écouté et j’ai quitté le pays. C’était la guerre, et les contrôles s’enchaînaient sur présentation de la carte d’identité. Moi, pour éviter les ennuis, je l’ai mangé, ma carte.
Les règles de ce jeu étaient simples et toutes dictées : « tu vas sortir de la pièce et faire comme si rien ne s’était passé ».
1, 2, 3 Roi du silence !
Je n’ai pas eu le temps de réaliser. J’étais déjà dehors, dans ce jardin, au milieu des adultes. Faire comme si de rien n’était. Ne rien dire. Ne pas croiser de regards.
Apprendre, si vite et de façon si ancrée par la suite, à porter un masque et à faire semblant.
Je suis née le 2 janvier 1996. Mes parents renvoient l’image d’un couple heureux. Mon arrivée est pourtant vécue comme un drame. Je suis laissée de côté par une mère démissionnaire, maltraitante et égoïste. Il y a un monde entre avoir un enfant et être capable de s’en occuper. Moi, j’étais plutôt son animal de compagnie (quoi que, certains animaux vivent certainement une meilleure vie que la mienne).