Après presque un an de travail commun, Myrtille voit enfin le résultat concret de ses efforts. Entre ses mains, elle tient son livre. Celui qui la raconte, et qui fait de son histoire, une histoire.
Écrire : quoi ? pour quoi et pour qui ?
Très tôt, l’écriture est apparue comme un exutoire pour Myrtille. Mais pour elle, au-delà de simplement raconter, il s’agissait de dénoncer. Dénoncer la présence sournoise et quotidienne de la violence dans nos vies, dans notre monde, et questionner les solutions qui pourraient la transformer.
Et puis, au fil du temps, son envie d’être publiée a laissé la place à un manuscrit abandonné.
Quand elle me contacte, son objectif est double : aller au bout de son idée et extérioriser, une bonne fois pour toute.
« Il y avait deux possibilités : écrire le traumatisme, ou écrire ma vie. Plus nous avancions, plus j’avais envie de tout raconter. »
Myrtille
L’écriture comme acte de transmission
Il n’est jamais simple de faire la part des choses et de faire le tri dans ce que l’on raconte.
Identifier sa motivation et son lectorat sont deux étapes clefs, indispensables au bon déroulé de l’écriture d’une autobiographie restaurative.
« A chaque relecture, je me demandais : comment est-ce qu’un inconnu lambda va interpréter mes propos et y trouver de l’intérêt ? ».
Pour Myrtille, la cible et les propos sont clairs depuis le début. De ce fait, l’exercice de co-écriture en a été facilité et les temps de relecture plus fructueux.
« Je voulais dire que dans une vie, on ne peut pas rester centré que sur les traumas. La vie est tellement multiple, tellement riche et complexe, qu’il y a plein d’autres choses à dire et à ne surtout pas oublier. »
L’écriture comme acte de guérison
« L’autobiographie restaurative fait partie intégrante de mon processus de soin et de guérison. Je ne distingue pas l’écriture du livre du processus thérapeutique déjà initié auparavant. »
L’accompagnement de Myrtille s’inscrit dans le parcours de soin proposé par l’association VIVO, un collectif pluridisciplinaire qui agit pour la prise en charge globale des personnes victimes de violence en tout genre.
Une fois les conséquences psychocorporelles de la violence guéries, chaque patient.e se voit proposer la possibilité de sublimer son histoire à travers l’autobiographie restaurative.
« Ma façon de raconter mon histoire a évolué, comme si les mots s’étaient déverrouillés. Plus ma guérison avançait, et plus la manière de raconter mon histoire s’enrichissait. Désormais, je l’assume. »
Soigner la relation à son histoire
« Je me sens restaurée dans ma manière de narrer mon histoire. Quand je rencontre une nouvelle personne, je sais mieux me positionner dans l’oralité. J’ai été restaurée dans ma parole : je suis plus au clair sur comment et quand en parler. Je me suis approprié mon histoire, et je n’ai plus besoin de l’analyser à travers un regard extérieur. »
Ecriture et paroles sont intimement liées. Ce qui ne peut pas être dit peut parfois être écrit. Dans ce cas, le choix des mots est tout aussi important, et peut être facilité par la possibilité de gommer, récrire, modifier, recommencer, effacer, reformuler…
Les versions sont nombreuses avant d’arriver au résultat final, qui lui-même, sera certainement amené à évoluer avec le temps. Mais au moment d’y apposer le point final, l’important est de se sentir libéré et soulagé.
« Je ressens un enrichissement des mots que je mets sur mon histoire ; un enrichissement de mon histoire. J’arrive à y voir du beau. »