L’autobiographie restaurative – Etape 3 : sublimer

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« Il faut combattre l’idée qu’écrire sur soi est indécent. C’est le propre de l’écriture autobiographique de sublimer le quotidien. C’est pourquoi c’est une armure à la portée de tous. »

Mathieu SIMONT, écrivain et avocat.

A travers la démarche d’autobiographie restaurative, le narrateur souhaite élaborer son récit de vie pour le transformer et amorce ainsi un mécanisme de sublimation. A l’image du Kintsugi, l’autobiographie restaurative permet de réparer notre vécu en soulignant nos lignes de failles avec de la véritable poudre d’or au lieu de chercher à les masquer.

Mettre des mots sur des maux

Le premier pas de la libération passe en général par la parole. Or la parole ne s’accompagne pas toujours de la justesse des mots. Conscient que notre traumatisme peut aussi détruire notre entourage, nos premiers mots sont souvent bruts et sortent de façon maladroite. On lâche une bombe que l’on ne maitrise pas. On crache plus qu’on ne raconte, on vomit plus qu’on ne dévoile. Parfois même, on attaque, car la violence de ce que l’on a vécu n’est pas encore digérée.

Cette première étape est nécessaire dans son spontanéité pour ses effets cathartiques.

Dès lors que l’on veut s’inscrire dans un processus de réparation et d’intégration, l’écriture aura le mérite de sublimer. Comme le dis Boris CYRULNIK dans La nuit, j’écrirais des soleils, ce n’est plus l’acte de parole qui libère, mais le travail de la recherche des mots et des images, de l’agencement des idées.

L’histoire est alors transformée. Les émotions douloureuses deviennent des expressions émouvantes, surprenantes, élégantes grâce aux mots qu’on y associe.

La création d’un monde de mots permet d’échapper à l’horreur du réel. Ce qui ne peut pas être dit peut être écrit. Le narrateur devient auteur et se réapproprie son histoire en y mettant les mots qui sont les siens. Il poétise ainsi le réel et construit sa propre réalité.

Guérison et résilience

Le Kintsugi touche à la symbolique de la guérison et de la résilience. Soignée, puis honorée dans un livre, notre histoire jusqu’ici brisée assume désormais son passé, et devient paradoxalement plus résistante aux épreuves, plus belle et plus précieuse qu’avant le choc.

Les épreuves deviennent de opportunités de reconstruction et non plus des cassures. La blessure se révélera peut-être paradoxalement bénéfique après un long travail, après avoir été pansée et pensée.

Le propre d’une autobiographie restaurative n’est pas d’inscrire dans le temps un traumatisme ou un événement de vie, ni de l’oublier, mais de mettre en lumières toutes les ressources qui ont été mobilisées pour surmonter l’épreuve.

Ainsi, notre relation à notre histoire pourra évoluer. Après avoir libérer notre parole et transformer l’expérience en lui donnant un sens, la phase de sublimation permettra de porter un autre regard sur notre vécu, plus conciliant, plus beau.

Après lecture, le narrateur doit pouvoir se dire : j’aime mon histoire et j’aime la personne que je suis.

Paroles de sublimations

« Plus je lis les chapitres de ma vie, plus j’assume mon histoire et plus j’ai envie de la partager », « Je ne pensais pas que mon histoire pouvait être intéressante et légitime à raconter », « Je suis heureux d’avoir retranscrit mes émotions, mes sentiments et mes perceptions », « J’ai besoin de mettre des mots sur mon histoire : il faut que j’en fasse quelque chose de bien », « Mon histoire est violente, mais il y a aussi des pans de lumière à aller récupérer », « Les choses sont dites comme elles sont, sans analyse, et elles sont justes parce qu’elles sont comme ça », « Je ne veux pas écrire la violence, mais le beau de ma vie ».

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