« Les enfants sont télépathes »

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Ce que cette affirmation de Françoise DOLTO dit de nos blessures et en quoi se raconter en psychothérapie ou à travers l’autobiographie restaurative peut nous libérer

Ce que voulait dire Dolto

Quand Françoise Dolto affirmait que « les enfants sont télépathes », elle ne parlait évidemment pas de dons paranormaux. Elle pointait avec lucidité ce que bien des praticiens, psychothérapeutes ou biographes constatent au fil des récits : les enfants ressentent tout, captent les ambiances, les tensions, les silences. Et surtout, ils interprètent.

Le mot « télépathie » traduit cette capacité sensorielle extrême des enfants à percevoir les émotions non verbalisées de leur entourage. Une colère retenue, une tristesse muette, un mensonge voilé… L’enfant ne comprend pas, mais il sent. Et ce qu’il ressent sans pouvoir le nommer, il le garde.

Ce que l’enfant capte, il l’intègre

L’enfant est dans une phase d’apprentissage global : il apprend le monde, les relations, le langage… mais aussi le sens de ce qu’il ressent. On peut parler d’hypersensibilité psychique face au non-dits. Quand les émotions de l’adulte sont incohérentes avec ses mots (par exemple : « tout va bien » alors que tout hurle le contraire), cela crée une confusion.

Et cette confusion peut devenir une croyance intérieure :

  • « Je dois être responsable de ce malaise. »
  • « Si je fais encore mieux, tout ira mieux. »
  • « Je ne dois pas poser de problème, je dois m’adapter. »

Ces interprétations deviennent ensuite des messages contraignants qui guideront les comportements à l’âge adulte : sois fort, fais plaisir, sois parfait, dépêche-toi, fais des efforts

Ces messages-là sont au cœur de l’analyse transactionnelle, et ils prennent souvent racine dans cette télépathie émotionnelle que Dolto évoque.

Récits figés, identités contraintes

En grandissant, nous nous racontons une histoire sur nous-mêmes. Mais cette histoire est souvent teintée de ces premiers ressentis non verbalisés. Ce sont des récits forgés en réaction à des climats familiaux, des douleurs tues, des secrets ou des tabous :

  • « J’ai toujours dû être l’adulte dans ma famille. »
  • « J’étais l’enfant sage qu’on ne remarquait pas. »
  • « J’ai appris à ne pas déranger. »

Ces récits sont porteurs d’un enjeu de survie psychique à un moment donné. Ils ont été utiles. Mais ils deviennent parfois des prisons narratives. Ils empêchent l’adulte de faire autrement.

Autobiographie restaurative : relecture, réparation, libération

C’est ici que l’autobiographie restaurative prend tout son sens. Elle n’est pas un exercice intellectuel. C’est une démarche d’apaisement identitaire. Elle invite à écouter à nouveau cette voix de l’enfant, celle qui a ressenti sans comprendre, et à lui redonner la parole, aujourd’hui, depuis un espace adulte, sécurisé, enveloppant.

Ce travail narratif permet de :

  • Faire émerger ce qui était confus, oublié ou intériorisé sans mot
  • Mettre à distance certains récits hérités ou dominants
  • Identifier les croyances forgées à partir de ressentis anciens
  • Créer un dialogue intérieur : entre l’enfant d’hier et l’adulte d’aujourd’hui

Ce que l’Analyse Transactionnelle nous enseigne sur les messages parentaux

L’analyse transactionnelle (AT) offre un cadre puissant pour comprendre ce processus. Elle distingue trois états du moi :

  • Le Parent : ce que nous avons intériorisé de nos figures d’autorité
  • L’Adulte : notre capacité à analyser, décider, être dans l’ici et maintenant
  • L’Enfant : ce que nous avons ressenti, compris, vécu dans notre enfance

Dans le travail psychothérapeutique, il s’agit de permettre à l’Enfant libre de se réexprimer, de guérir, de retrouver sa spontanéité. Et cela passe souvent par un travail sur l’histoire. Par la relecture de ce que nous avons capté, cru, interprété – et qui ne nous convient plus.

Raconter pour se retrouver

Ce que nous avons ressenti enfant continue d’influencer notre manière d’être, même silencieusement. C’est pourquoi se raconter, c’est se retrouver. C’est retrouver cette part de soi qui a dû se taire. C’est relier les morceaux, avec douceur, avec nuance.

Redonner la parole à l’enfant en soi, ce n’est pas rester bloqué dans le passé. C’est se libérer pour habiter enfin son présent.

Un récit de vie restauratif ne cherche pas à faire joli. Il cherche à faire juste. Il cherche à réunir toutes les parts de soi : celles qui ont pleuré, celles qui ont résisté, celles qui ont grandi.

Et au cœur de cette démarche, il y a souvent cette intuition douloureuse, mais fondatrice, que Dolto avait si bien nommée :

Les enfants sont télépathes.

Et c’est justement pour cela qu’ils ont tant besoin qu’on les réécoute. Même des années plus tard.

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